Le centre de relaxation, remise en forme et de rééducation dans lequel travaillait Amaury était un endroit assez calme pour être reposant même pour les employés. Le patron n'était pas toujours sympa, mais les responsables savaient faire en sorte que la bonne ambiance ne règne. Après tout, ce n'était pas toujours facile d'avoir de bonnes relations avec les collègues, et de supporter tout les jours un travail qui pouvait paraître répétitif, et les très peu rares plaintes des patients quant à leurs vies, et autres petites choses.. Non, ce n'était vraiment pas dans les choses les plus agréables, et beaucoup ne le supportaient pas. Pourtant, Amaury, pour ce qui le concernait, adorait son boulot. Entre la petite musique agréable en fond, les différentes odeurs des crèmes de massages, ou des huiles essentielles qui servaient tant dans le coin thermes que pour le massage, le fait qu'il ne fasse jamais ni trop chaud ni trop froid dans la partie du complexe où il travaillait, qu'il faisait ce qu'il aimait et ce qu'il avait toujours voulu faire, que, même si ses relations avec le patron n'étaient vraiment pas très bonnes, il disposait de certains avantages par rapport à un autre endroit pour travailler, et qu'il sentait enfin avoir sa place, l'endroit était le meilleur où se trouver pour le jeune homme.
Ce jour-là, il avait commencé le travail comme d'habitude, à une heure et demi. Il avait réussi, quelques temps auparavant, de trouver un compromis avec les responsables. Après tout, il restait assez longtemps, et travaillait même le samedi, alors, s'il dépassait le temps de travail maximum, autant qu'il choisisse lui de comment était modulé son emploi du temps. Cela faisait facilement cinq heures non stop qu'il tournait entre les salles de massages, et les salles de sport, servant à la rééducation en priorité, dans laquelle il surveillait que tout allait bien. Il avait de nombreux patients qui venaient pour un massage alors que cela n'avait rien de médical, juste pour qu'on prenne soin d'eux. Alors, pour ceux qui attendaient de voir le "Dr Esteban" et bien, ils pouvaient attendre quelques instant qu'il vérifie que dans la salle mitoyenne à son espèce de cabinet, tout se passe pour le mieux. Et pour ce qui concernait la prise en charge d'un nouveau patient, le système était toujours le même : la secrétaire du complexe qui s'occupait de la section kinésithérapie devait prévenir celui ou celle qui devait passer qu'il fallait attendre dans le cabinet. Rien de bien compliqué jusque là.
Après un long moment sans massage à faire, Amaury alla dans la salle de sport, s'occuper d'un enfant, qui avait eu un accident de voiture, et qui devait marcher sur un tapis roulant, s'appuyant sur des poignées mises spécialement pour lui pour pouvoir reprendre l'habitude de marcher.. ce qui n'était vraiment pas facile, pas après ce qu'il lui était arrivé. Et avoir autant de détermination à son âge était un quelque chose qui émouvait Amaury. Après avoir encouragé et parlé avec le jeune garçon, qui finalement, dû partir, Amaury le raccompagna, avant de revenir dans la salle qui lui était consacré. Il se mit rapidement à son bureau, et attendit le prochain patient, dont il ne savait pas s'il venait, ni même qui était-ce. Son carnet de rendez vous lui servait strictement à rien, puisqu'il ne le regardait jamais.. Peut-être à son désavantage, d'ailleurs.

 

Entrez donc, mademoiselle !
Amaury était toujours au bureau de la petite salle qui lui était réservée pour ses massages et l'accueil des patients. La tête baissée, sur les papiers, il avait à peine relevé les yeux lors de l'entrée de la jeune femme, qu'il avait cependant saluée, sans écouter de trop son nom. Il n'avait entendu que son nom de famille, James. Qui, aux Etats-Unis, était assez répandu, donc il n'avait bien évidemment pas fait le lien avec la jeune femme. Et de toute façon, ne sachant pas son prénom, il ne l'aurait peut-être pas reconnu directement. Après tout, voilà presque neuf années qu'il ne l'avait pas vue, sinon plus, alors il ne l'aurait pas reconnue, sans rien dire dans la rue. Ou peut-être, en regardant bien attentivement. Mais Amaury n'était pas du tout attentif. Il passait sa vie la tête en l'air. Alors, ça lui portait souvent préjudice, sauf au boulot, puisque cela semblait indifférer les gens. Tant mieux, dans un sens, cela aurait pu lui causer du tort dans le reste de sa vie.
Le jeune homme se leva, et proposa à la jeune femme de s'asseoir sur le fauteuil.
Alors, que vous arrive-t-il, mademoiselle ?
demanda-t-il d'une voix douce et gentille. Le premier contact avec les patients n'était jamais simpl. Autant faire en sorte que cela se passe bien, même si parfois, il se trouvait face à des geignards. en regardant la jeune blonde dans les yeux, il fronça les sourcils. Son visage lui disait quelque chose, et ne lui était pas vraiment inconnu. Mais qui était-ce ? Le souvenir que cela amenait semblait à la fois lointain et pourtant si proche. Ne sachant pas s'il se trompait ou non, il finit par lâcher
Excusez moi... mais est-ce qu'on se connaît ?
Oui, c'était assez étrange, mais peut-être avait elle déjà été patiente ici, mais qu'il n'avait pas tilté. Après tout, nombreux étaient les gens qui venaient exceptionnellement, alors peut-être était-ce son cas ?

Amaury soignait toujours tous les patients qui venaient à lui. Peu importait qu'ils ne soient lourds, incompréhensifs envers le travail qu'il pouvait fournir, ou qu'ils ne passaient leur temps à se plaindre. Mais il n'avait pas l'habitude de s'occuper des gens qu'ils connaissaient. Mais rien n'était sûr, il ne devait pas connaître la jeune blonde. Juste une impression de déjà-vu, une tête familière, rien de plus. Enfin, c'était ce qu'il en croyait savoir. Elle lui dit qu'elle avait un simple torticolis, ce qu'il vérifia en posant ses mains sur son cou pour voir que rien ne soit déplacé ou autre, que c'était simplement une douleur musculaire. Il passa rapidement ses doigts sur son cou, et acquiesça.

Oui, ce n'est qu'un torticolis.. Mais il vous faudra faire attention malgré tout. Si d'ici demain ou après -demain, la douleur persiste, il faudra aller voir votre médecin qui vous prescriras des séances et des médicaments. De même s'il s'agit de torticolis à répétition. Cela peut-être dû au stress, alors il vous faudra des relaxants. Enfin, nous n'y sommes pas encore..

Amaury lui demanda de s'allonger sur le fauteuil de soin, et écouta ce qu'elle disait. Bethany..? Non, ce n'était pas possible.. Ici, la chance pour qu'ils se retrouvent alors qu'il n'avaient plus contact et ne venaient pas du pays ni l'un ni l'autre. C'était juste mathématiquement impossible. Il écarquilla les yeux, ne sachant pas trop s'il devait décliner son identité, ignorer ou faire semblant qu'il ne la connaissait pas. Après tout, la jeune femme l'avait un peu laissé tomber, des années auparavant, ce qui faisait qu'il ne savait pas trop sur quel pied danser désormais. Et il avait tellement souffert dans le passé, ce qui l'avait transformé en -certes pas trop méchant- bourreau des coeurs de ces jeunes femmes. Préférant ignorer pour l'instant, il n'avait pas trop envie de s'entendre dire qu'il avait changé physiquement que ceci ou que cela, il voulait faire son boulot. C'était la dernière patiente, autant ne pas se prendre la tête et finir plus vite.
Oui, la nouvelle avait un peu perturbé le docteur Esteban, mais il fallait bien essayer de continuer sa journée de boulot, avant de finir à la porte. Il entreprit donc de masser le cou de la jeune femme.

Amaury avait été un peu gêné de la situation. N'était-ce pas horrible de sa part de ne pas dire à la jeune femme qui il était ? Après tout, c'était tout simplement une chose due... Mais peut-être qu'il craignait un peu la suite à venir. Après tout, ça avait toujours été plutôt compliqué pour lui de gérer la rupture avec elle, et même si cela datait largement, il ne s'en était jamais vraiment remis. Sinon, peut-être qu'il aurait finit par avoir une relation stable. Restant de marbre, et silencieux, il continuait à masser le cou de la jeune femme. Il devrait lui dire, ce serait la moindre des choses, après tout. Oui, voilà, il le lui dirait après la séance. Le temps passait, mais étrangement pas aussi lentement que dans n'importe quelle situation embarrassante. La vitesse du temps était tout simplement normale à ses yeux. Les moments de silence étaient souvent comblé par les 'est-ce que ça fait mal si j'appuie ici' d'Amaury, qui essayait de voir grosso-modo ce qu'elle avait pour essayer de soulager la douleur. Après tout, qu'il ne la connaisse ou non, il s'agissait de son métier, donc il était normal qu'il essaie de la soigner, même s'il ne pouvait pas faire des miracles non plus, encore moins en une séance. Qui finit par prendre fin. Une fois qu'il eut terminé, Amaury essuya ses mains qui étaient encore grasses à cause de la crème et s'éloigna du fauteuil des patients ou se trouvait Bethany.

Voilà, c'est fini. Il faudra que le médecin fasse une ordonnance pour des séances supplémentaires de kinésithérapie et tout rentrera dans l'ordre

Amaury regarda la jeune femme et lui sourit. Malgré toute chose, c'était assez sympathique de la revoir. Mais il ne savait juste pas vraiment comment il devait réagir à ce qui semblait être un coup du hasard.

Et au fait, Bethany.. ça me fait plaisir de te revoir

dit-il avec un regard gentil, et avec toute la sincérité dont il pouvait faire preuve. Au moins de ne pas la laisser mariner dans son jus, et de lui faire comprendre qu'il l'avait reconnu, et de ne pas laisser place à cette ignorance horrible dont moulte gens savaient faire preuve. Lui également, parfois.

La situation était gênante. Il n'avait jamais vraiment surmonté le fait que la jeune blonde soit partie juste à cause de la distance. Amaury ne savait pas vraiment s'il l'aimait encore, mais il lui en avait toujours voulu. Et de ce fait, il en voulait à presque toutes les femmes qui n'étaient pas de sa famille. Pour la première fois, son boulot lui avait donné l'impression d'être une tâche à accomplir. Et plus vraiment une passion. Quand une situation n'était pas très agréable, ou plutôt gênante, on avait l'impression que le temps était long. Surtout avec le silence et tout ce qui c'était installé entre les deux personnes. Après tout, cela faisait plusieurs années qu'ils ne s'étaient pas vus. Mais c'était tout simplement peut-être le moment de faire une trêve et de se faire la paix à soi-même par rapport au passé. Et si Amaury arrivait à faire cette trêve avec lui-même, il n'aurait pas de soucis à pardonner son passé, tout simplement. Malgré toute chose, il était vraiment heureux de retrouver la jeune femme. ça lui faisait plaisir de la voir. Même s'il aurait préféré que ce ne soit pas dans le cadre obligatoire du travail. Ainsi, le temps aurait peut-être paru moins long. Amaury sourit doucement à la jeune femme.

Oui, très étrange, il faut le dire. Mais bon, il faut de tout pour faire un monde, non ?

De tout, et de toute sorte de situations, surtout. L'avantage, c'était qu'il avait pu revoir Bethany, au moins. Elle lui avait manqué, même si ce n'était pas forcément un manque amoureux. D'ailleurs, il ne savait même pas si c'était ou non le cas. Amaury ne savait pas vraiment où il en était, et cette rencontre inattendue ne l'aidait pas. Il aurait peut-être du essayer d'y penser avant, histoire de savoir un peu tout ce qui se passait dans sa propre vie. La proposition de la jeune femme l'étonna un peu, mais après tout, c'était une excellente idée.

Oui, bien sûr pourquoi pas ! Si tu veux, on peut aller boire un verre un de ces quatre. Ou bien aller manger quelque part. Ca me ferait plaisir aussi.