Tôt dans la journée, vers 10h30, Amaury avait été appelé par l'hôpital en urgence. Le patient dont il avait la charge pour la rééducation avait poussé trop fort, trop tôt, et s'était retrouvé dans l'incapacité de se mouver ne serait-ce qu'un tout petit peu. Il savait que c'était un cas assez compliqué, on le lui avait dit lorsqu'on lui avait demandé de s'occuper de lui. Mais pourquoi lui avoir proposé à lui, Amaury ? Après tout, ce n'était pas comme si le jeune Estebàn était très expérimenté, très renommé. Non, il était kiné attitré depuis moins de deux ans, et était un quasi inconnu, sauf pour les clientes du petit cabinet qui l'avait embauché.. Mais c'était tout à fait impossible que ces vieilles dames soient allées jusqu'à l'hôpital juste pour dire ô combien elles aimaient qu'il soigne leurs maux de dos..
Il venait à peine de se lever lorsqu'il avait reçu cet appel en urgence. Mal réveillé, il ne pouvait que grogner envers ce patient qui savait parfaitement bien qu'il ne devait pas faire d'effort sans sa présence tant qu'il n'y aurait pas de signe encourageant.

Ce fut donc en soupirant et à contre coeur que le kinésithérapeute se prépara, passant sous la douche, puis s'habilla rapidement. Même s'il n'avait rien dans le ventre, il prit sa voiture, et conduit le plus rapidement possible, même s'il ne dépassait pas la limitation réglementée, jusqu'à arriver à l'hôpital. En passant à l'accueil, il signala sa présence, chose qu'il était étrangement obligé de faire, il passa dans les vestiaires, se changea avec sa blouse de médecin, avant de repasser devant la boulangerie, se prenant un croissant, qu'il mangea en montant les escaliers qui menaient jusqu'à la chambre du patient agaçant. Il entra dans la chambre après avoir tapé, et s'occupa de lui faire un massage pendant une bonne demi-heure, avant de l'amener dans la salle de rééducation, juste à côté d'un service qui donnait des frissons au jeune médecin : le service de cancérologie. Pendant une heure, il fit faire des exercices au patient, avant qu'une infirmière ne vint à se proposer de le ramener dans sa chambre, lorsque ce que le patient appelait 'l'entraînement' fut fini.

Amaury fut des plus ravis, en voyant que le patient recommançait à bouger normalement. Quelle idée aussi de prendre des poids trois fois supérieurs à ce qu'il portait habituellement? Il y avait des choses que le jeune homme ne comprendrait jamais. Mais bon. Il sortit de la salle de rééducation, en se massant le coup, se dirigeant vers la machine à café. Une fois devant la machine, il se choisit un cappuccino. En l'attendant, Amaury -ou plutôt son ventre - fut prit de gargouillement. Super... 1A cause du patient, il n'avait même pas fini son croissant, et l'avait mangé tellement vite qu'il ne s'était même pas nourri normalement.. Il regarda sa montre. Bon, ça va, dans moins d'une demi-heure, il pourrait quitter l'hôpital, et aller manger dans la brasserie du coin qu'il aimait bien.

Une fois son café prêt, il le sortit, et s'assit sur une des trois petites tables hautes qui se trouvaient devant la machine. Il regardait les gens, patients comme médecins, passer devant lui. En y réflechissant bien, il était des plus heureux de ne pas avoir fait un métier médecin comme chirurgien, ou médecin généraliste. C'était tellement... stressant, pour quelqu'un comme lui, qui aimait prendre son temps, même s'il fallait rester beaucoup plus longtemps pour que les choses soient faites à la perfection. Dans la hâte, il ne réussissait jamais à accomplir son travail, qui était pourtant comme sa vocation..

© Fiche de Hollow Bastion sur Bazzart

Tranquillement installé sur son tabouret haut, à Savourer son Cappuccino, Amaury se sentait bien. Il avait toujours faim, mais il n'y pensait plus. La seule chose qui le déplaisait était de ne pas avoir autre chose à faire. Certains patients étaient désagréables, mais ils rythmaient sa journée. N'ayant pas vraiment la possibilité de faire de nombreuses choses dans la journée, passant la plupart de son temps à s'inquièter si un signal retentissait. Il n'était pas comme les chirurgiens, mais il avait pour obligation de ramener ses fesses dès qu'on lui demandait . Donc, il ne faisait jamais énormément de choses. Rien de mieux, que me diriez-vous? Du coup, il passait souvent ses journées à traîner, juste parce qu'il n'aimait pas arrêter quelque chose puis devoir le reprendre des heures après. C'était principalement par son unique faute qu'il ne faisait jamais rien

C'était donc pour cela qu'Amaury ne faisait des choses que pendant ses vacances. De toute façon, tous les célibataires avaient une vie assez.. calme? oui, le mot convenait juste assez bien pour ne pas faire trop morose, ne pas exagérer mais également pour définir la véritable réalité. Mais celle-ci convenait parfaitement au jeune homme. Enfin, il aimait à y croire, même si parfois ce n'était pas le cas.

Amaury était donc concentré sur son café, qu'il buvait à petites gorgées, en pensant et en recherchant à qualifier sa vie, et en la jugeant juste assez agréable pour lui, même s'il n'aimait pas la routine, qu'il aimait bouger, son travail, lui offrait certaines possibilités, et vu ses horaires, il pouvait facilement compenser avec des activités physiques, heureusement, lorsqu'il entendit son nom être prononcé. Il releva alors la tête et vit devant lui un visage qu'il connaissait bien. En un peu plus mature, peut-être le visage. Il blémit, comme s'il venait de voir un fantôme. Non que cette vision ne l'enchantait pas, mais cela faisait étrange. Surtout... dans un hôpital.. c'était une rencontre des plus impromptues.

Be...Bethany..

A ce moment là, ce fut comme si la porte qu'il avait essayé de fermer ses huit dernières années venait de s'ouvrir en grand, laissant tout ce qu'il avait essayé de garder enfoui, d'oublier venait de resurgir,, sans prévenir.

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Voir Bethany sur son lieu de travail était certainement la chose la plus inattendue pour Amaury. Déjà qu'il ne pensait pas la revoir de si tôt, pensant même que leur chemins ne se recroiseraient plus jamais. Après tout, quelle était la probabilité de se retrouver dans le même hôpital, dans une ville à cent mille lieu de la ville où deux personnes s'étaient rencontrées, et d'où elles venaient ? Surtout que ce n'était pas comme si l'hôpital où Amaury travaillait était le seul de la ville, bien au contraire. Peut-être avait-elle, tout comme lui, fini ses études de médecines, et qu'elle était désormais quelque chose comme chirurgien. Et comme la vie à New-York City était bien meilleure que celle de Londres, elle était venue pour exercer son boulot, ayant choisi cet hôpital pour une raison qu'il ne trouvait pas forcément. Deux personnes qui travaillent au même endroit ont beaucoup de possibilités de se retrouver. Après, tout cela n'était que supposition, et il était possible qu'elle ne soit pas devenue médecin, qu'elle rende visite à quelqu'un qu'elle ne connaissait. Le mieux serait de lui demander.


La situation était malgré tout étrange. Il avait une sensation bizarre, une sensation de mal-être, à se trouver face à son seul vrai grand amour. Comme s'il se sentait coupable,de quelque chose qu'il ne saisissait pas encore. D'avoir tenté de l'oublier ? Il n'en savait rien. De la retrouver, surtout, après avoir tout tenté pour continuer à vivre normalement. Oui, certainement. C'était, pour lui, comme se trouver face à un fantôme, à quelqu'un qui n'existait plus, mais qui avait finalement repris vie. C'était le cas de la jeune femme dans l'esprit d'Amaury. Non pas qu'il ne l'ait complètement oubliée. On n'oublie jamais son premier amour, comme lui disait tellement souvent sa mère.

Il la regardait silencieusement, comme s'il détaillait ce qui avait changé chez la jeune femme. Elle semblait avoir maigri depuis la dernière fois qu'il l'avait vue. Mais ça ressemblait à un amincissement dû aux changements qu'on subissait entre 15 ans et 24 ans. On aurait dit la fille qu'il connaissait, mais également une autre, qui lui était inconnue. Il tenta de faire bonne figure,et de ne pas ressembler à quelqu'un de totalement déboussolé par cette rencontre inattendue.


Demanda-t-il, en faisant un grand sourire qui se voulait des plus à l'aise.

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