Papa don't preach

Zappant de manière compulsive, sans même vraiment voir les images qui défilaient, j'étais plongé dans mes pensées. Plongées dans de plus belles images – les plus belles images du monde – depuis que j'avais vu l'échographie en trois dimensions de mon fils. Depuis que j'avais pu voir son petit nez, ses lèvres formant un O, son petit pouce en cherchant la localisation. Cette image était si belle, si incroyable. Je m'étais fait une raison. Toutes ces années, j'avais fini par accepter l'idée qu'Eireen serait à jamais la seule à pouvoir se targuer d'avoir un rôle de fille dans ma vie, un rôle d'enfant. Elle n'était pas ma fille biologique, certes. Je n'étais que son oncle. Mais j'avais passé la moitié de ma vie à l'élever et de sang ou pas, elle était ma fille, autant que celle de mon frère. Je l'aimais comme la chair de ma chair et elle était l'oiseau précieux que j'avais vu grandir et s'épanouir. Le bijou éclatant que je craignais de voir partir, le jour où elle se sentirait prête à s'envoler, à devenir le joyaux d'un autre homme...

Eireen elle-même vint me sortir de mes pensées au bout d'un moment, me faisant arrêter mon zapping intempestif sur une chaîne de clip musicaux. Elle me demanda ce que je faisais et je lui offris un sourire alors qu'elle s'installait sur le canapé à mon côté. « Hey, ma puce. Officiellement, je zappe », dis-je en lui montrant la télécommande que je tenais dans la main. « Officieusement... j'étais pris dans mes pensées. Et toi ? » Elle me proposa ensuite de discuter, annonçant que cela faisait longtemps, mais je la connaissais trop pour ne pas voir qu'elle n'était pas à l'aise. Inquiète. Je me tournais donc dans sa direction, posant le bras sur le dossier du canapé et reposant ma tête dans ma main, les yeux sur elle. « Un sujet en particulier, mon cœur ? », demandais-je, trop conscient qu'elle ne demandait pas là une discussion anodine et qu'elle avait besoin de parler de quelque-chose de précis.

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Papa don't preach

Elle avait l'air si frêle, si mal au creux de mes bras, que je ne pouvais que m'inquiéter. Surtout quand elle m'avoua ne pas savoir comment me le dire. Mais me dire quoi ? Je ne la regarderais plus de la même façon ? Mais que voulait-elle dire bon sang ? Me décevoir ? « Eireen, mon cœur... », dis-je doucement, pour l'inciter à parler, la serrant un peu plus dans mes bras. Et elle m'avoua avoir passé une nuit avec Noaa, son meilleur ami. J'allais lui demander ce qu'elle voulait dire, habitué depuis longtemps à les voir tous les deux s'endormir dans le lit d'Eireen alors qu'ils regardaient un film. Ils savaient que j'étais toujours dans le coin, surveillant que les choses n'aillent pas plus loin entre eux, mais ça n'avait jamais été. Noaa c'était toujours tenu très convenablement en ma présence, mais il fallait croire que c'était en ma présence seulement, car apparemment, ils avaient été plus loin que l'innocent smack d'enfant. Surtout quand elle annonça penser être enceinte. Mon étreinte chaleureuse se figea, alors que je cessais soudainement de respirer. « Tu es quoi ? », demandais-je d'un ton totalement neutre, pas tout à fait sûr d'avoir intégré encore. Je crois que je suis enceinte... Non, elle ne pouvait pas avoir dit ça. Non, non, non, non... Je me redressais d'un bon, commençant à parcourir le peu d'espace vide qu'il y avait dans le salon, empoignant mes cheveux alors que j'essayais d'intégrer. Je crois que je suis enceinte... La phrase tournait vite dans ma tête. Trop vite. Alors que j'essayais encore de l'intégrer. « Comment ça ''je crois'' ? », demandais-je tout d'un coup en me figeant, la regardant droit dans les yeux, attendant juste une réponse. Attendant juste pour comprendre.

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Papa don't preach

Eireen. Mon bébé. Ma princesse. Ma petite fille. Elle était enceinte. Non !!! Enfin... Elle était peut-être enceinte... Probablement, même, puisque deux tests sur trois étaient positifs. Attendez, pourquoi deux sur trois ? Ça n'était pas fiable ces foutues choses ? Cette simple question suffit amplement pour me pousser à reprendre mes cent petits pas, essayant de calmer ma respiration et de comprendre comment nous avions pu en arriver là.

Et puis en pleurant, elle me demanda si je pouvais venir avec elle et je m'arrêtais une seconde pour la regarder, avant de reprendre ma route, essayant toujours d'intégrer. « Bon sang Eireen, il y a genre quoi... cinq mois ? Je t'ai annoncé que j'avais fait la bêtise de ne pas me protéger et que Siobhan était enceinte... comment tu... » Et moi, comment pouvais-je la blâmer ? J'avais donné un si mauvais exemple après tout. J'avais été le premier à avoir des relations sexuelles non protégés. Je pouvais difficilement lui faire la morale... Oui, mais j'étais le père et l'adulte et elle n'était qu'une enfant... Bon d'accord, une belle jeune femme, mais elle était encore une adolescente. Elle ne devrait même pas avoir de vie sexuelle. Je ne devrais même pas savoir qu'elle avait une vie sexuelle active. Comment pouvais-je en arriver là, à savoir qu'elle couchait et en plus qu'elle couchait sans se protéger, alors que je venais de lui sortir un petit frère parce que moi-même j'avais fait cette bêtise là neuf mois plus tôt. Liam n'était pas une bêtise. Mon fils était le plus beau des cadeaux, mais il était arrivé sous le coup d'une bêtise et si j'étais en âge et en capacité situationnelle et financière pour assumer les conséquences de ma folie et le cadeau offert, elle n'était qu'une...

Sa voix suppliante me demanda de ne pas lui en vouloir et je me mordis la lèvre en me mettant à genou devant elle. Je pris doucement une de ses mains entre les miennes, apportant ses doigts à mes lèvres pour y poser un doux baiser. « Oh ma puce... », gémis-je doucement de désarroi. « Je ne t'en veux pas, j'ai juste... Je suis inquiet. Tu es si jeune encore... » Je libérais doucement une de mes mains, gardant toujours la sienne dans l'autre et portait ma main libre à sa joue pour la caresser doucement. « Chérie, je... Je vais juste tuer ce garçon et ensuite on affrontera ça ensemble, d'accord ? »

Bon, clairement, il n'y avait aucun réalisme, ni aucune inquiétude à avoir sur le fait que je puisse réellement m'en prendre à ce garçon – quoi que je pouvais juste lui faire très mal à défaut de commettre un crime -, mais je voulais surtout qu'elle comprenne qu'elle n'avait pas à s'inquiéter que je la rejette. « On va aller voir le docteur, oui et ensuite, suivant ce qu'il dira, on avisera tous les deux. On l'a toujours fait, non ? On affronte ensemble toutes les situations possibles. »

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Je voulais me montrer soutenant, pas accusateur, quand je voyais combien elle était mal et effrayée elle-même. Elle m'avoua être d'accord, mais m'assura préféré que je ne touche pas un cheveu de son amie et je me crispais à l'entente de son prénom, serrant un peu ses doigts. Heureusement, elle parlait également de préservatif ayant eu un problème et on pouvait sans mal imaginer que c'était cette partie de sa phrase qui me crispait... D'ailleurs, cela me rendait vraiment malade... mais le fait est que le jeune homme l'appelait Nooa et depuis quelques temps, ce prénom n'avait pas la meilleure connotation dans ma tête, parce qu'un Noah avait fait tant de mal à ma collègue et mère de mon fils qu'elle avait une peur bleue des hommes, avait accouché presque deux mois avant son terme et viendrait vivre à la maison à sa sortir de la maternité parce que ni elle ni moi ne pouvions supporter l'idée qu'elle retourne à son appartement. Son ami n'avait décidément pas grande chose pour l'aider dans cette histoire. Gosse irresponsable qu'il était.


Eireen se cala dans mes bras, m'assurant qu'elle m'aimait et je posais un baiser dans ses cheveux en la serrant contre moi. « Je t'aime aussi, mon cœur », soufflais-je doucement, si facilement enclin à le lui dire, maintenant que mon fils était né, maintenant que j'avais peur, en permanence, qu'elle pense que mon fils pouvait la remplacer dans mon cœur et la reléguer au rang de nièce adoptée et plus à la place de fille d'adoption.

Elle me demanda quand on irait chez le médecin et je desserrais un peu mon étreinte pour pouvoir regarder son visage. « Je crois qu'un bon parent dirait que s'il doit y avoir un bébé, il est primordial que tu te prennes en main dès à présent pour pouvoir assumer donc... Je serais là, je te le promets, mais c'est à toi d'appeler pour prendre rendez-vous Eireen. » J'avais parlé le plus doucement possible, inquiet de lui faire peur ou de lui insuffler une certaine forme de culpabilité, mais elle devait agir comme une grande. S'il y avait bébé et qu'elle devait mener une grossesse, elle devait agir comme une adulte et assumer jusqu'à la naissance... Et peut-être au-delà...

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