It's been a while

Journée de repos pour Rory. Journée de repos bien mérité. Aujourd'hui, il ne passera pas la moindre petite minute dans ce bar qu'il apprécie de moins en moins. En réalité, cela fait déjà un moment qu'il ne supporte plus d'y travailler, mais c'est tout ce qu'il a et il est redevable envers son patron, qui lui a permis de rester dormir alors que le bâtiment était en construction, et qui lui a offert cet emploi qui lui a permis de sortir de la rue, de se payer le luxe d'avoir enfin un toit à lui, aussi modeste soit-il, au-dessus de la tête. Le loyer n'est pas donné, mais puisqu'il se permet peu d'extras, qu'il n'a pas vraiment de hobbies, ni même d'amis, Rory sur ses temps libres, passe énormément de temps à juste profiter d'être chez lui et de ne rien faire. Enfin, ne rien faire est un peu exagéré, le barman adore lire, ça lui permet de s'évader de sa dure réalité. Il dévore de nombreux romans, et il lit un peu de tous les styles. Récemment, il vient de finir un des livres de la chronique des Vampires de Anne Rice, auteur qu'il apprécie énormément. D'ailleurs, il n'a plus chez lui, un ouvrage qu'il n'a pas déjà lu. Depuis un moment, il songe à éventuellement s'inscrire à la bibliothèque, ce qui sera certainement bien plus économique pour lui, qui lit tellement.

Son estomac le ramène à la réalité, le tirant de ses pensées, protestant sur le manque de nourriture dont il a besoin. Rory se lève de son canapé, dans lequel il était confortablement installé et se dirige vers le frigo dans le coin qui office de cuisine dans son petit appartement. Quand il l'ouvre, le châtain désespère devant le vide à l'intérieur. C'est décidé, il faudra qu'il sorte au moins pour faire quelques courses, et réapprovisionner frigo et placards. C'est dans ces derniers qu'il trouve une portion de nouilles asiatique. Pratique, rapide, consistant et bon. Saveur curry, parfait, ce sont ces préférées. Le jeune homme fait bouillir de l'eau et le temps que cela se fasse, il prépare déjà un cabas pour les courses, ses clefs, sa carte, bref, tout ce qu'il lui faut pour sortir faire quelques emplettes vitales. Avant de partir, il prend le temps de remplir cet estomac qui crie famine. Le loyer et les charges imputées à l'appartement, lui prenant une grande partie de son salaire, ne lui permettent pas de pouvoir de nourrir correctement, ni même vraiment régulièrement. Rory à l'habitude, il fractionne, proportionne, conserve, il sait gérer, mais cela ne suffit pas à combler ses besoins en apport calorique et autres et cela se voit au faible poids qu'il arbore. Ses joues creuses en premier témoin de cette malnutrition.

Puisqu'il fait relativement beau, finalement le barman décide d'en profiter pour faire une balade, et fera ses courses en revenant, histoire de ne pas être encombré le temps qu'il marche. En chemin, il passe devant la bibliothèque, et soudainement, son idée de s'y inscrire lui revient. Maintenant qu'il est devant, autant en profiter et comme ça, il pourra déjà prendre un ou deux livres à lire ces prochains jours. Il regarde un instant la bâtisse avant de se décider à y entrer. Il observe l'intérieur, émerveillé de tant de livres. Puis il cherche du regard l'accueil, qu'il ne met pas longtemps à trouver. Rory s'y pose et attend patiemment que quelqu'un arrive. Après quelques instants, alors qu'il a la tête baissée à lire des prospectus que se trouvent sur le comptoir, il sent une silhouette proche de lui. « Je peux vous aider ? » Le jeune homme relève la tête, prête à répondre et à demander les renseignements nécessaires pour s'inscrire, quand il reste bloqué devant le visage qui lui fait face. « Sid ? » Le châtain n'en revient pas et subitement, il sent le rouge lui monter aux joues. Rory détourne le regard, ne pouvant soutenir celui de celle qui a été toujours là pour lui quand il en avait besoin, dans la mesure de ses moyens. Mais qu'il a perdu de vue après avoir été embauché dans le bar où il travaille toujours. Ce n'est pas volontaire cette absence de nouvelle, juste qu'il n'avait plus beaucoup de temps pour lui les premiers temps, ce qui est plus ou moins toujours le cas aujourd'hui. Mais surtout, il n'avait plus aucun moyen de contacter la jeune femme pour la prévenir. « Je... Euh... » Rory est plus que mal à l'aise et ne trouve pas ses mots.

It's been a while

Jamais, Rory ne s'est attendu à tomber sur la soeur de son ex-copain en venant ici. D'ailleurs, s'il avait su qu'elle serait là, il ne sait pas vraiment s'il aurait eu le courage d'entrer et de l'affronter. Ils ont été amis, elle a été là pour lui après que son frère ait quitté le châtain, alors le jeune homme s'en veut vraiment de ne plus lui avoir donné de nouvelles après qu'il se soit fait embauché au bar où il travaille toujours. Ce n'est pas qu'il a volontairement voulu couper les ponts avec elle, bien au contraire, elle était une de ses rares amies, il n'avait pas envie de ne plus la voir, c'est juste qu'il n'a plus eu le temps au début, et que quand il a pu, qu'il est retourné à son appartement, la demoiselle avait déménagé et il n'avait plus aucun autre moyen de la contacter. Alors oui, il se sent coupable, parce que s'il n'avait pas trainé, s'il avait pris le temps de la prévenir qu'il avait trouvé un emploi, ils n'auraient pas perdu deux ans de leur amitié et surtout, Sid ne serait pas là, devant lui à clairement lui en vouloir d'avoir déserté, vu la grimace qu'elle arbore en guise de sourire et l'intonation dans sa voix en s'adressant à lui. « Je... Je ne vais pas trop mal. J'ai un petit boulot fixe maintenant. C'est la gloire, mais au moins j'ai un toit au-dessus de la tête. » Il esquisse un sourire timide et gêné, n'osant pas vraiment la regarder droit dans les yeux. Sid a tous les droits de lui en vouloir et il le comprend parfaitement. D'ailleurs, il ne lui en voudrait même pas si elle décidait de l'envoyer bouler, là tout de suite. « Je suis désolé Sid, vraiment. » Comment lui avouer sans la blesser qu'il n'a pas eu le courage de prendre le temps de venir la voir quand il aurait dû et qu'après c'était trop tard ?

Les mains dans les poches de son pantalon, il prend une profonde respiration avant de se lancer dans ses explications. Rory se sent dans l'obligation de se justifier auprès de la brunette. « Écoute, j'ai pas voulu ça tu sais. Quand j'ai eu ce job dans le bar, je faisais des heures pas possibles, j'ai pas trouvé le temps de passer. » Le châtain passe sa main sur sa nuque et se mordille la lèvre inférieure de nervosité et de culpabilité, avant de poursuivre. « Quand j'ai pu enfin venir, tu avais déménagé et je n'avais aucun moyen de trouver ta nouvelle adresse. Vu que je n’ai pas de téléphone, je ne pouvais pas te joindre non plus. Je suis sincèrement désolé. Parce que je ne pourrais jamais assez te remercier de tout ce que tu as fait pour moi tout le temps où j'ai été à la rue. » Étant un garçon assez sensible, il se laisse aisément submerger par ses émotions, alors il laisse sans le vouloir, exprimer tous ses remords par ses yeux larmoyants. Il se retient péniblement de ne pas se mettre totalement à pleurer. Il déteste être si émotif. Il est incapable de cacher ce qu'il ressent et c'est très frustrant, car souvent les gens en face de lui s'en servent contre lui. Alors pour ne pas craquer, il rebaisse les yeux vers les prospectus qu'il regardait avant que Sid n'arrive, pour couper le contact visuel avec elle. Il n'a pas envie de la colère, le dégoût, le rejet ou autre sentiment péjoratif à son égard dans ses yeux. « Et... et toi, qu'est-ce que tu bien depuis la dernière fois ? » C'est la moindre des choses que de le lui demander aussi, et puis ça l'intéresse vraiment. Il s'est souvent demander où elle était, ce qu'elle faisait, il n'a jamais oublié Sid durant ces deux années écoulées. « Je comprendrais si tu ne veux pas me répondre et si tu ne veux plus me voir aussi. J'ai merdé, je n’ai pas été à la hauteur de ton amitié. » Une des manies du barman, c'est de constamment se dévaloriser. Il n'a absolument aucune confiance en lui. Cela a toujours été, même quand il était encore chez ses parents, mais le peu de confiance qu'il pouvait avoir à ce moment-là s’est envolé au moment même où il a franchi le seuil de la maison pour se retrouver à la rue après la trahison de son frère aîné.